Le shérif Nick Corey est un fainéant notoire. Mais il est prêt à tout pour garder son travail. Et quand on dit prêt à tout, on n’exagère pas. Plus malin qu’il en a l’air, il sait arranger les pires situations pour qu’elles se retournent à son avantage... Un roman noir avec une intrigue brillamment ficelée, un sens de la narration qui subjugue, saupoudré d’un humour, noir lui aussi, auquel on se laisse aller avec un délice coupable. Excellent.
...Continua"Je suis entré dans cette maison, dans celle-ci et dans des douzaines d'autres pareilles, peut-être plus de cent fois. Mais jamais auparavant je n'avais réalisé ce qu'elles sont. Pas de foyers, pas des endroits où les gens peuvent vivre, non. Exactement rien. Des planches de sapin assemblées autour du vide. Pas de tableaux, pas de livre - rien à regarder, rien pour s'occuper le cerveau. Que du vide, un vide qui, petit à petit, s'infiltre en moi. Et tout d'un coup, ce vide n'est pas seulement ici, il est partout, dans toutes les maisons. Et en même temps, il se remplit de bruit, de visions et de fureur, de toutes les choses affreuses et sinistres que ce vide a provoquées.
Les pauvres petites filles sans défense qui pleurent en voyant leur père se glisser dans leur lit. Les hommes qui battent leurs femmes et les femmes qui hurlent des supplications. Les gosses qui pissent au lit, d'angoisse et de peur, et leurs mères qui les punissent en les aspergeant de poivre rouge. Les visages hâves, hagards, ravagés par le ténia et le scorbut. La sous-alimentation, les dettes toujours plus fortes que le crédit. La hantise, comment on va manger, comment on va couvrir nos pauvres culs tout nus. Le genre d'obsession qui fait que, quand on n'a rien d'autre dans la tête, mieux vaut être mort. Parce que le vide des idées, quand on est déjà mort en dedans, et qu'on ne fait plus que répandre la saloperie, la terreur, les larmes, les cris, la torture, la faim et la honte de sa propre mort. De son propre vide."